21 juin 2006

cartographier des contrées à venir

L'incipit de Mille plateaux présente ainsi le livre-rhizome :

medium_vermeer_geographe.jpgNous avons écrit l'Anti-OEdipe à deux. Comme chacun de nous était plusieurs, ça faisait déjà beaucoup de monde. Ici nous avons utilisé tout ce qui nous approchait, le plus proche et le plus lointain. Nous avons distribué d'habiles pseudonymes, pour rendre méconnaissable. Pourquoi avons nous gardé nos noms ? Par habitude, uniquement par habitude. Pour nous rendre méconnaissables à notre tour. Pour rendre imperceptible, non pas nous-mêmes, mais ce qui nous fait agir, éprouver ou penser. Et puis parce qu'il est agréable de parler comme tout le monde, et de dire le soleil se lève, quand tout le monde sait que c'est une manière de parler. Non pas en arriver au point où l'on ne dit plus je, mais au point où ça n'a plus aucune importance de dire ou de ne pas dire je. Nous ne sommes plus nous-mêmes. Chacun connaîtra les siens. Nous avons été aidés, aspirés, multipliés.
[...]
Écrire n'a rien à voir avec signifier, mais avec arpenter, cartographier, même des contrées à venir.

Gilles Deleuze ; Félix Guattari, Mille plateaux (Minuit, 1980, p. 9 et 11)

06 mars 2006

pensée échappée

Hasard donne les pensées, et hasard les ôte ; point
d'art pour conserver ni pour acquérir.
Pensée échappée, je la voulais écrire ; j'écris, au lieu,
qu'elle m'est échappée.


Blaise Pascal, Les Pensées, VI, " Les Philosophes "