01 juin 2006

fragilité des fragilités

Benasayag évoque également (p. 201) le célèbre début du livre biblique assez atypique et quasi oriental de L'écclésiaste (Qohélet) : traduit en général par « Vanité des vanités, tout est vanité », il pourrait également être rendu par le moins moralisateur : « Fragilité des fragilités, tout est fragilité ».
Dans la Bible de Jérusalem , une note précise en effet que « Le terme dont nous gardons la traduction traditionnelle "vanité" signifie d'abord "buée", "haleine", et fait partie du répertoire d'images (l'eau, l'ombre, la fumée, etc.) qui décrivent dans la poésie hébraïque la fragilité humaine. »


Citons pour le plaisir la suite du Prologue de L'écclésiaste :

Vanité des vanités, dit Qohélet ; vanité de vanités, tout est vanité.
Quel profit trouve l'homme à toute la peine qu'il prend sous le soleil ? Un âge va, un âge vient, mais la terre tient toujours. Le soleil se lève, le soleil se couche, il se hâte vers son lieu et c'est là qu'il se lève. Le vent part au midi, tourne au nord, il tourne, tourne et va, et sur son parcourt retourne le vent. Tous les fleuves coulent vers la mer et la mer n'est pas remplie. Vers l'endroit où coulent les fleuves, c'est par là qu'ils continueront de couler.
Toutes les paroles sont usées,
personne ne peut plus parler ;
l'œil n'est pas rassasié de ce qu'il voit
et l'oreille n'est pas saturée de ce qu'elle entend.
Ce qui fut, cela sera,
ce qui s'est fait se refera,
et il n'y a rien de nouveau sous le soleil !

[…]
Moi, Qohélet, j'ai été roi d'Israël à Jérusalem. J'ai mis tout mon cœur à rechercher et à explorer par la sagesse tout ce qui se fait sous le ciel. C'est une mauvaise besogne que Dieu a donnée aux enfants des hommes pour qu'ils s'y emploient. J'ai regardé toutes les œuvres qui se font sous le soleil : eh bien, tout est vanité et poursuite de vent !
Ce qui est courbé ne peut être redressé,
ce qui manque ne peut être compté.
Je me suis dit à moi-même : Voici que j'ai amassé et accumulé la sagesse plus que quiconque avant moi à Jérusalem, et, en moi-même, j'ai pénétré toute sorte de sagesse et de savoir. J'ai mis tout mon cœur à comprendre la sagesse et le savoir, la sottise et la folie, et j'ai compris que tout cela aussi est recherche de vent.
Beaucoup de sagesse, beaucoup de chagrin ;
plus de savoir, plus de douleur.

Les commentaires sont fermés.