22 mai 2006

tel un singe en colère

La belle expression « essence de verre » (parfois traduit « essence de miroir ») est empruntée à Shakespeare, qui fait dire à Isabelle, dans Mesure pour mesure, que l’homme est « très ignorant de ce qu’il croit connaître le plus, son essence de verre » :

Could great men thunder
As Jove himself does, Jove would never be quiet,
For every pelting petty officer
Would use his heaven for thunder, nothing but thunder.
Merciful heaven,
Thou rather with thy sharp and sulphurous bolt
Splitt'st the unwedgeable and gnarled oak
Than the soft myrthe. But man, proud man,
Drest in a little brief authority,
Most ignorant of what he ’s most assured,
His glassy essence, like an angry ape,
Plays such fantastic tricks before high heaven
As makes the angels weep, who, with our spleens,
Would have themselves laugh mortal.


Si les puissants pouvaient tonner
Comme le fait Jupiter, il ne serait jamais tranquille
Car chaque petit fonctionnaire minable
Se servirait dans son ciel de tonnerre, et de rien d'autre.
Ciel miséricordieux,
Tu préfères, de ton coup tranchant et sulfureux,
Fendre le chêne noueux, inaccessible au coin,
Plutôt que le tendre myrte. Mais l'homme, l'homme orgueilleux,
Drapé dans sa frèle et précaire autorité,
Qui se trompe le plus quand il se croit le plus sûr,
Son essence de miroir, tel un singe en colère
Joue des tours si fantasques devant les cieux altiers
Que les anges en pleurent, eux qui, avec nos rates, se mueraient tous en mortels à force de rire.


William Shakespeare, Measure for Measure (Acte II, scène 2)

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